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Page:Vontade - La Lueur sur la cime.pdf/83

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sourire de moquerie retenue, mais il s’ennuie bien là-bas, le pauvre. Il regarde le paysage avec un air fâché, comme s’il n’arrivait pas à trouver la place convenable pour une ligne de chemin de fer… Ce doit être un ingénieur, et pas du tout un bourreau, comme tu voudrais me le faire croire ? Quel dommage ! Appelle-le. J’aimerais le voir de près.

— Avoue que c’est l’hypothèse du bourreau qui t’intéresse ?… Et si elle était exacte ?

— Tant pis ou tant mieux !

— Je puis te donner sur lui un renseignement qui t’en dégoûtera sans doute. Ce n’est pas un homme du monde. Il est né en Norvège d’une bonne famille bourgeoise, mais, avec son pays, — où il n’est pas retourné depuis douze ans, – il a quitté les préjugés sur lesquels pivote l’existence de tes pareilles… C’est un esprit très libre, il vit, en dehors de toute convention… Je crains que tu ne le trouves singulièrement inhabile aux compliments.

— J’en serai ravie ! Si tu savais comme j’en ai assez des compliments.

Mademoiselle Barozzi fit un signe à Erik, qui s’approcha rapidement.

— Permets-moi de te présenter monsieur Erik Hansen.

Puis Léonora se tut et prit un air de distraction.

Après avoir salué, le jeune homme demeura silencieux, examinant Jacqueline avec une attention grave qu’il ne prenait la peine de masquer sous aucune attitude de déférence. Embarrassée un moment, elle dit avec une grâce quêteuse de sympathie :