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IX
INTROUDCTION

nous avons chanté Te Deum laudamus, ayant auprès de nous quatre évêques et abbés mitrés.

Mais comme, dans ce bas monde, il ne saurait y avoir de pur bien, – car le pur bien est au ciel, le pur mal en enfer, et notre monde est un mélange de bien et de mal, – voilà que, hélas ! notre cithare a dû changer ses cantiques joyeux en de nouvelles plaintes, et l’harmonie de nos orgues a été interrompue par des voix pleines de larmes ! En effet, dans cette même année, au mois de décembre, cinq jours après Noël, l’ennemi de la paix humaine a excité nos concitoyens à une telle discorde et tribulation que, au milieu des rues et des places, ils se sont attaqués l’un l’autre, les armes en main. À quoi ont succédé nombre de meurtres, de blessures, d’incendies et de rapines. Et l’aveuglement de la haine commune est allé si loin que, pour s’emparer de la tour de notre église de Saint-Laurent, une troupe de nos concitoyens n’a pas craint de mettre le feu à l’église, dont tout le toit s’est trouvé brûlé. Et cette périlleuse sédition a duré depuis le cinquième jour de Noël jusqu’au jour du 7 février. C’est à la suite des événements susdits qu’on a décidé de nommer capitaines du peuple messires Conrad Spinola et Conrad Doria.

Et non moins admirable, non moins digne d’être commémoré, fut le rôle joué à Gênes par Jacques de Voragine en tant que père des pauvres de son diocèse. De cela non plus il ne fait point mention, dans sa Chronique ; mais les auteurs génois s’accordent à nous dire que, durant les six années de son épiscopat, la ville a été comblée de sa charité. « Toutes les vertus rivalisaient en lui », reconnaît Muratori, peu suspect de partialité à l’égard d’un homme dont il traite l’œuvre entière de « bavardage imbécile ». D’autres nous affirment que, aussi longtemps qu’il fut évêque, pas une fois on