Page:Voragine - Légende dorée.djvu/256

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les églises sont à Dieu, et nous ne pouvons donc pas les donner à César. » Enfin, 3o la constance de saint Ambroise nous apparaît dans la façon dont il a su blâmer le vice et l’iniquité. On lit dans l’Histoire tripartite que, le peuple de Thessalonique s’étant révolté et ayant tué quelques fonctionnaires, l’empereur Théodose en fut si irrité qu’il fit mettre à mort tous les habitants de la ville, au nombre de près de cinq mille, sans distinguer les innocents des coupables. Or, lorsqu’il vint ensuite à Milan et voulut entrer dans l’église, saint Ambroise le reçut devant la porte et lui interdit l’entrée, en lui disant : « Comment, empereur, après un tel crime, ne reconnais-tu pas l’énormité de ta présomption ? Ou bien, peut-être, ta dignité impériale t’empêcherait-elle de reconnaître tes péchés ? Tu es prince, ô empereur, mais tu es, comme les autres hommes, l’esclave de Dieu. Comment oserais-tu étendre vers Dieu des mains encore tachées du sang innocent ? Comment oserais-tu prier Dieu, dans son temple, avec la même bouche qui a proféré un ordre injuste et monstrueux ? Allons, retire-toi, afin de ne pas accroître d’un second péché le poids du premier ! » Et l’empereur, pleurant et gémissant, reprit le chemin de son palais. Et comme le chef de ses troupes lui demandait la cause de sa tristesse : « Hélas ! répondit-il, aux esclaves et aux mendiants les églises sont ouvertes, et moi seul n’ai pas le droit d’y pénétrer ! » Alors Rufin : « Si tu veux, je vais courir vers Ambroise, pour qu’il te délivre de son excommunication ! » Et il insista si fort que Théodose finit par le laisser aller. Mais dès qu’Ambroise vit Rufin, il lui dit : « Tu imites l’impudence des chiens, Rufin, en aboyant contre la majesté divine ! » Et comme Rufin le suppliait pour son maître, Ambroise, enflammé du feu céleste, lui dit : « Je te déclare que je lui interdis l’accès du saint lieu. Et s’il change son pouvoir en tyrannie, volontiers j’accepterai la mort ! » Rufin rapporta ces paroles à l’empereur, qui dit : « Je vais aller vers Ambroise, pour recevoir, en face, ses justes reproches. » Alors Ambroise, continuant à lui défendre l’entrée de l’église, lui dit : « Quelle pénitence