Page:Voragine - Légende dorée.djvu/494

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qu’il n’était plus manichéen, sans être encore vraiment catholique. Mais il avait commencé à s’attacher à saint Ambroise et à écouter souvent sa prédication. Or, un jour, le saint avait longuement démontré les erreurs des manichéens, tant par des preuves tirées du raisonnement que par d’autres tirées de l’autorité ; et, dès ce moment, l’hérésie avait presque disparu du cœur d’Augustin. Quant à ce qui lui arriva plus tard, lui-même le raconte tout au long dans ses Confessions. Partagé entre son goût pour la voie du Christ et sa crainte de pénétrer dans une voie aussi étroite, il hésitait, lorsque Dieu lui inspira la pensée d’aller consulter saint Simplicien, en qui brillait la lumière de la grâce divine. Et Simplicien se mit aussitôt à l’encourager, en lui disant : « Combien d’enfants servent Dieu dans l’Église ! Et toi, savant docteur, tu n’oses le faire ! Jette-toi dans les bras de Dieu ! Il te recevra et te sauvera ! »

Vers le même temps arriva d’Afrique un ami d’Augustin, nommé Pontien ; et cet homme lui raconta la vie et les miracles du grand Antoine, qui était mort en Égypte sous l’empire de Constantin. L’exemple de ce saint alluma une telle ardeur dans l’âme d’Augustin que, se précipitant chez un de ses amis, nommé Alipe, il s’écria : « Que tardons-nous ? Les ignorants se lèvent et gagnent le ciel ; et nous, avec toute notre science, nous nous plongeons en enfer ! » Puis il s’enfuit dans un jardin, s’étendit sous un figuier, et se mit à pleurer amèrement. Or, pendant qu’il pleurait, il entendit une voix qui lui disait : « Prends et lis, prends et lis ! » Aussitôt il ouvrit les Actes des Apôtres et lut, au hasard : « Revêtez-vous du Seigneur Jésus ! » Aussitôt les ténèbres du doute achevèrent de se dissiper en lui.

Cependant il souffrait de maux de dents si forts que, comme il le dit lui-même, il était presque tenté d’admettre l’opinion du philosophe Corneille, qui plaçait le souverain bien de l’âme dans la sagesse, et le souverain bien du corps dans l’absence de douleur. Ses maux de dents étaient, en effet, si vifs qu’il en avait perdu l’usage de la parole. Ne pouvant parler à ses amis, il leur écrivait,