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Page:Voyages de Francois Bernier (éd. 1710), vol. 1.pdf/114

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Histoire des États

le monde lui diſoit, & ce que ſes amis mêmes lui écrivoient qu’infailliblement Chah-Navaze-kan le trahiſſoit.

Jamais homme ne fut plus ſurpris qu’Aureng-Zebe, quand il apprit que Dara étoit dans Amed-Abad, car il ſçavoit bien qu’il ne manquoit pas d’argent, & que tous ſes amis & tous les mécontens qui étoient en grand nombre ne manqueroient pas de ſe retirer peu à peu vers lui ; & d’ailleurs il ne voyoit point de ſeureté à l’aller chercher lui-même en ce lieu là, s’éloignant ſi fort d’Agra & de Chah-Jehan, & d’aller s’embaraſſer dans

toutes ces terres des Rajas Jeſſeingue, Jeſſomſeingue & autres qui font en ces Provinces là ; outre qu’il apprenoit que Sultan Sujah avançoit avec une forte Armée, qu’il étoit déja vers Elabas, & que le Raja de Serenaguer ſe preparoit à décendre des montagnes avec Soliman-Chekouh ; de forte qu’il ſe trouva affez embaraſſé & aſſez en peine de quel côté il pouſſeroit. Enfin il crut qu’il ſeroit plus à propos de laiſſer là Dara en repos pour quelque temps avec Chah-Navaze-kan, & d’aller au plus preſſant, c’eſt à dire vers Sultan Sujah qui avoit déja paſſé le Gange à Elabas.

Sultan.