Aller au contenu

Page:Voyages de Francois Bernier (éd. 1710), vol. 1.pdf/117

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
109
du grand Mogol.

ſe reſolut comme à la bataille de Dara de ſoûtenir le plus qu’il pourroit & d’attendre de pied ferme toute ſorte d’évenement. Cependant le deſordre ſe mit de plus en plus dans ſon Armée ; Sujah qui veut profiter de l’occaſion prend ſon temps, & le pouſſe vigoureuſement ; le conducteur de l’Elephant d’Aureng-Zebe eſt tué d’un coup de fléche, il le conduit lui-même le mieux qu’il peut juſqu’à ce qu’un autre ſoit remonté, les fléches pleuvent ſur lui, il ne s’épargne pas d’en tirer lui-même, l’Elephant a peur & recule : le voilà dans une grande extrémité, & juſqu’à tel point qu’il mit un pied hors de ſon ſiege, comme s’il eût voulu ſe jetter à terre, & l’on ne ſçait pas même dans ce trouble ce qu’il auroit fait, n’eût été que l’Emir Jemla, qui en étoit tout proche & qui faiſoit au-delà de tout ce qu’on devoit attendre d’un grand homme comme lui, lui cria en hauſſant la main, Decankou, Decankou, où eſt le Decan ? Voilà ce ſemble la derniere extrémité, où pouvoit être reduit Aureng-Zebe ; on diroit que c’eſt à ce coup que la fortune l’abandonne, & l’on ne voit preſque pas qu’il en puiſſe échapper, mais ſon bon-heur eſt plus fort que tout

cela ;