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Page:Voyages de Francois Bernier (éd. 1710), vol. 1.pdf/144

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Histoire des États

ſon malheureux Deſtin rebuta ce conſeil, & ne voulut rien entendre de tout ce qu’on lui propoſoit, diſant, comme il étoit vrai, que la marche ſeroit très-difficile & très-dangereuſe, & ſoutenant toûjours que Gion-kan ne ſeroit pas ſi lâche que de le trahir après le bien qu’il lui avoit fait. Il partit malgré tout ce qu’on lui pût dire, & s’en alla éprouver aux dépens de ſa vie, qu’il ne faut jamais ſe fier à un méchant homme.

Ce voleur qui croyoit d’abord qu’il eût beaucoup de gens qui le ſuiviſſent, lui fit le meilleur accueil du monde, & le receut avec beaucoup d’amitié & de civilité en apparence, plaçant ſes ſoldats deçà & delà chez ſes ſujets, avec ordre de les bien traiter & de leur donner tous les rafraichiſſemens qui ſe pourroient ; mais dès qu’il ſceut qu’il n’avoit pas plus de deux à trois cens hommes en tout, il montra auſſi-tôt quel il étoit ; l’on ne ſçait pas s’il n’avoit point receu quelques lettres d’Aureng-Zebe, ou ſi fon avarice ne fut point tentée à cauſe de quelques mules qu’on diſoit être chargées d’or, qui étoit tout ce qui s’étoit pu ſauver jufques-là, tant de la main des voleurs que de

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