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Page:Voyages de Francois Bernier (éd. 1710), vol. 1.pdf/82

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Histoire des États

autant de courage & de vigueur qu’il eſt poſſible ; il bleſſa Morad-Bakche & s’en approcha de ſi prés qu’il commençoit à couper les ſangles de son Elephant pour le jetter par terre ; mais la valeur & la fortune de Morad-Bakche ne lui en donna pas le temps ; car enfin jamais homme ne combattit plus genereuſement que Morad-Bakche dans cette occaſion ; tout bleſſé & preſſé qu’il étoit des Ragipous de Ramſeingue Routlé qui s’étoient acharnez autour de lui, jamais il ne s’effraya ny ne recula d’un pas, & il ſceut si bien prendre son temps, qu’encore que de ſon bouclier il eût à couvrir ſon fils âgé de ſept à huit ans qu’il tenoit aſſis à ſon côté, il porta un coup de fléche à Ramſeingue Routlé qui le jetta mort par terre.

Dara ne fut pas long-temps à recevoir cette fâcheuſe nouvelle, &, en même temps on l’aſſeura que Morad-Bakche étoit en très-grand danger, les Ragipous s’étans mis en fureur & combatans comme des lions pour vanger la mort de leur maître ; & quoi qu’il vit que de ce côté là le chemin étoit fort difficile & qu’il trouvât toûjours quelque petit corps qui lui faiſoit tête, & qui le

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