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Page:Voyages de Francois Bernier (éd. 1710), vol. 1.pdf/83

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du grand Mogol.

retardoit, on le vit neanmoins determiné à pouſſer vers Morad-Bakche ; & c’étoit auſſi ſans doute le parti qu’il y avoit à prendre, & qui eût été capable de reparer la faute qu’il avoit faite de ne pouſſer pas Aureng-Zebe ; mais ſa mauvaise fortune l’en empêcha ; ou pour mieux dire, l’une des plus noires trahiſons qu’on ait jamais imaginée, & la plus grande beveuë qui ſe ſoit jamais faite, cauſerent la perte & la ruine entiere de Dara.

Calil-ullah-kan, celui qui commandoit les trente mille Mogols qui faiſoient l’aîle droite, & qui ſeuls étoient capables de deffaire toute l’Armée d’Aureng-Zebe, pendant que Dara & ſon aîle gauche combatoient avec tant de force & même avec tant de bonheur, ſe tient à l’écart les bras croiſez, comme s’il n’eût point été de la partie, ſans permettre qu’aucun de ſes Cavaliers tirât un ſeul coup de fléche ; ſous pretexte qu’il faiſoient le corps de reſerve, & diſant qu’il avoit ordre exprés de ne combattre que dans la derniere extrémité : Mais la veritable cauſe étoit ce qu’il tenoît caché dedans le cœur, ſçavoir cet ancien affront que Dara lui avoit fait quand il lui fit don-

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