Page:Vrain-Lucas, Le parfait secrétaire des grands hommes, Cité des livres, 1924.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Sur ce, je prie Dieu avoir Vostre Majesté en ses bones graces.

Ce 8 septembre 780.

Alcuin.


HÉLOÏSE


À mon doulx et très amé Abaillard.


Mon doulx amy,

Je vois que je n’estois pas née pour estre heureuse, je viens d’en faire l’épreuve. De l’état le plus brillant, où j’estois, je tombe tout à coup dans les plus grands tormens par suite des affreux suplices qu’on vous a fait endurer. Ah ! que les hommes sont cruels, mon doux amy, vous avoir fait suporter telles souffrances. Si vous ne pouvez y survivre, je n’y survivray non plus.

Du reste et quant mesmes, je veux mourir, ouy, mourir pour ce monde impitoyable. Ma résolution est bien prise, ains que jà vous en ay parlé. J’entre au couvent pour n’en jamais plus sortir, car un malheur si soudain, si imprévu, m’enlève tout espoir de bonheur.

Ce n’est pas le bien que mon oncle m’a retiré que je regrette, vous devez en estre persuadé, mais ne dois je pas me plaindre contre le destin qui me ravit non seulement un amant, mais un époux devant Dieu, que j’aime si tendrement, car de croire que votre amour