Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t1, 1905, trad. Khnopff.djvu/172

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soir Ritter et Winterberger[1] m’ont induit à en jouer peu à peu les passages principaux. J’ai bien vu que j’avais fait une belle chose ! Toutes mes œuvres antérieures, les pauvres, sont jetées de côté par ce seul acte ! Ainsi je sévis contre moi-même, et occis tous mes enfants, à l’exception d’un seul.

Bonté divine ! Tu sais ce que je veux ! C’est limpide, clair, transparent comme la pureté de ton cristal le plus beau ! De mon véritable for intérieur ne monte plus le moindre nuage, qui pourrait voiler pour n’importe quel être la vue de ma clarté ! Ce sont les hommes qui les évoquent d’eux-mêmes et les épandent sur moi, ces nuages ; pendant combien de temps devrai-je encore les chasser, pour vous montrer que, après tout, je suis un homme bon et pur ? Et ce n’est point pour moi que je les chasse, ces nuages, car je resterais aussi bien ce que je suis ; mais les hommes se cachent à ma vue derrière eux et je ne puis les réjouir ! —

Mon amie, que j’ai de difficultés, de difficultés à n’en pas finir ! Mais mon bon ange cependant me fait signe aussi ; toujours il me console et me procure le repos, quand j’en ai le plus besoin. En conséquence je veux le remercier et me dire : « cela devait être ainsi

  1. Pianiste et organiste, élève de Liszt.
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