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Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/163

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comte Náho[1] — qui se glorifie d’avoir été la première et la plus ardente à se dévouer pour ma musique à Vienne. Un jeune homme charmant, le prince Rodolphe Lichtenstein, qui, chemin faisant, passa prendre sa femme, tout à fait digne de lui et très douce, me mena au pied des montagnes où se trouve Schwarzau. Site merveilleux : la plaine, si elle était recouverte d’eau, rappellerait avec bonheur un lac suisse. Tout l’arrangement du château, d’un goût absolument exquis, trahit la fantaisie la plus rare, par le choix, l’ordonnance, l’invention. La comtesse, une dame qui approche de la quarantaine, avec de grands yeux noirs, étonnamment pleins d’esprit, est réputée pour son talent musical inné ; elle entretient une troupe de tziganes, qui est comme la « chapelle » de la maison ; elle se met au piano et se livre avec ces gens-là, pendant des heures, aux improvisations les plus merveilleuses. Je craignais de trouver en elle de l’exaltation, peut-être de l’affectation : son attitude me rassura bientôt. Mieux encore me renseignèrent sur le sérieux de son sens esthétique plusieurs copies vraiment surprenantes des plus beaux portraits de Van Dyck, dont elle me dit qu’elles lui avaient coûté beaucoup de peine, parce que, malheureusement, elle n’avait pas fait non plus d’études régulières en

  1. Prononcez « Nako ».