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131.

Biebrich,
12 Mars 1862.

Je vous écrivis, un jour, de Paris, que vous apprendriez désormais fort peu de chose de ma vie, mais d’autant plus de mes travaux,[1] parce que ma vie même ne pouvait plus avoir de vraie signification. Mais quid ? s’il m’est impossible de travailler, si la vie seule me donne du fil à retordre ? Il faut bien alors qu’interviennent des lacunes sérieuses, comme cette fois-ci, pendant lesquelles je devais vous laisser attendre aussi longtemps un signe de gratitude pour vos lettres, pour vos cadeaux ? Aussi je ne vous dis pas plus aujourd’hui que ceci : demain je compte finalement m’atteler à mon travail. Il y a eu une interruption de six semaines, durant lesquelles, il est vrai, j’ai seulement « vécu ». Mais comment ! —

Maintenant je suis complètement installé ici : j’ai loué deux chambres pour une année. Il s’y trouve un piano, une bibliothèque, le fameux divan, les trois gravures romaines et le vieux dessin des Nibelungen. Devant la table de travail pend aussi la photographie de la « colline verte » ; dans une encoignure de fenêtre le « palazzo Giustiniani ». La situation est extrêmement belle : tout près du Rhin, à côté du château, dans une maison complètement isolée, que Dieu puisse

  1. Voir lettre no. 125.