Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/218

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pas un jour à quelque maladie mortelle. Et c’est cela qui doit vous servir d’encouragement ! En vérité, je me trouve misérable ; mais je me trouve debout ! Seulement, je ne puis plus supporter la solitude absolue : le vieux chien de chasse, que m’a donné mon propriétaire, ne suffit point. Avec ma cinquantième année m’est venu un intense désir d’avoir auprès de moi une atmosphère filiale. Lorsque, dernièrement, Bülow me présenta sa petite fille, à Berlin, avec le regret que ce ne fût qu’une fille, je lui dis, plein de pressentiments : « Soyez heureux, vous aurez beaucoup de satisfaction de cette fille ! » Il y a peu de temps, on me recommanda une jeune fille de dix-sept ans, d’une honorable famille, douce, obligeante, toute naïve. Je la pris à mon service, pour me faire le thé, tenir en ordre mes effets, me servir de compagnie pour le dîner et la soirée. Dieu ! Quelle peine ce fut pour moi, de me débarasser de la pauvre enfant, sans lui causer d’humiliation trop manifestement ! Elle s’enuyait à périr, voulait retourner en ville ; mais elle s’efforçait par tous les moyens de tenir cachés ses sentiments, de sorte que ce fut un bonheur relatif pour moi de m’en défaire finalement, ce à quoi contribuèrent beaucoup mes projets de départ. Mon Dieu ! Et il serait aisé, pourtant, de me satisfaire : je sais combien facilement je m’accorde avec mes serviteurs. Je songeai à Vreneli, qui me servait à