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Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/246

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ne restiez plus que peu de temps à Vienne, nous aurions certainement avancé notre arrivée. Il n’en devait pas être ainsi ! Mais j’en ai perdu le sommeil, maintenant. Nous voulons surprendre les secrets de la Mère, là où elle est encore éveillée, à Venise. Lundi prochain, Otto et moi nous partons pour cette ville. Nous n’y resterons pas longtemps ; dans quinze jours ou, tout au plus, dans trois semaines nous revenons. Ce nous sera un réconfort avant le commencement du sommeil hivernal, tel que je l’attendais de Vienne. Quoique la vie, de temps à autre, semble être une idylle, le regard perspicace y découvrirait bientôt la matière d’une tragédie. La myopie réciproque des humains les sauve de la conscience ; « contempler » n’apporte pas la souffrance, « être », toujours. Vous, qui adorez Schopenhauer, vous devriez savoir cela ! Ainsi les hommes qui « contemplent » beaucoup et ne « sont » rien jouissent du plus grand bonheur ! Et, en somme, il s’agit « d’être heureux », n’est-ce pas ? Être grand, être bon, être beau, cela ne suffit pas à l’homme ; il veut être heureux aussi ! Etrange marotte ! Il me semble, que quiconque est grand, bon ou beau n’a plus besoin de l’appareil fatigant et illusoire du reste ! Mais qu’est-ce que je sais de cela, moi ?

Dans le monde des grands hommes d’ici, il y a des changements importants. Gottfried