Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t2, 1905, trad. Khnopff.djvu/250

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Un regard solitaire : tel est notre destin ! » Le livre contient un excellent portrait du défunt, où la nudité crue de la photographie est embellie et rehaussée par la force intellectuelle de l’homme. Quand vous serez plus près de moi, je serai heureuse de vous passer un livre de temps à autre, sans vous occasionner d’ennuis au Ministère. Ma pauvre petite caisse m’est revenue ; je l’ai tristement mise de côté. Dès que vous serez fixé quelque part, je me faufilerai certainement jusque là, tout comme les lutins poursuivaient le pauvre paysan ![1]… Comment va la santé — et le travail ?

À vous de cœur.

Mathilde Wesendonk.


16 Janvier 62.

5.

Le lion ailé[2] sur votre table de travail s’est réveillé. La force et l’intellectualité, voilà ce qu’il symbolise. Il secoue à bas de ses membres la lourdeur des rêves ; il agite sa crinière. Cela me rend heureuse ; je ne pense à rien d’autre. Pour tout ce qui vient du dehors confions-nous au destin. L’ennemi est à l’intérieur, dans les abîmes du cœur même.

Presque jamais, me semble-t-il, la source

  1. Voir lettre 23 et les allusions au « petit lutin ».
  2. Madame Wesendonk avait offert à Wagner le lion de St  Marc, en forme de presse-papier.