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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

qu’on appelait la Chasse sauvage. C’était une troupe infernale de chasseurs, une cohue de chevaux, de chiens, de cerfs et de sangliers qui, à minuit, roulait pèle-mèle au-dessus des bois. Malheur à celui qui se trouvait sur son passage ! C’était un tintamarre, un cliquetis d’armes, des rugissements si effroyables mêlés aux sons du cor, aux aboiements des chiens, aux hennissements des chevaux, que le cœur d’un mortel était trop faible pour y résister : ceux qui avaient vu la Chasse sauvage en mouraient presque toujours peu de temps après. Le jeune chasseur se rappelait aussi avoir entendu parler de celui qui conduisait les meutes aériennes, espèce de génie malfaisant connu sous le nom de Samiel, qui cherchait à enrôler des jeunes gens pour ses courses nocturnes. Dans ce but, Samiel détachait un de ses suppôts vers l’infortuné, dont il voulait faire sa victime. Celui qui lui servait d’instrument pour exécuter ses projets était un garçon adroit, rusé, déjà initié à ces mystères de l’enfer ; il circonvenait le jeune homme, s’insinuait dans son amitié, lui parlait souvent de certaines forces occultes, de certaines influences magiques, grâce auxquelles on était sûr de son coup, et qui mettaient le chasseur à même de l’emporter sur tous ses rivaux. Il lui disait que si on se rendait à certaine heure dans telle ou telle localité, on pouvait, à l’aide d’évocations très faciles à accomplir, conjurer des esprits, se les rendre