Page:Wagner - L’Anneau du Nibelung, trad. Ernst.djvu/227

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Siegfried.

Fort savant es-tu, Mime !
De toi j’eus maintes leçons,
mais ce que tu veux tant m’apprendre,
je n’en saurai rien jamais :
c’est à souffrir ta vue.
Si tu m’apportes
mets et boisson,
l’horreur m’enlève la faim.
Si tu me fais
Un lit bien moelleux,
dormir me pèse aussitôt.
Si tu m’enseignes
l’art d’être fin,
je m’aime mieux balourd.
Si je dirige mes yeux vers toi,
je trouve exécrable
chacun de tes faits.
Et quand tu marches,
boîtes et traînes,
cloches, et louches
de tes yeux qui clignent,
je voudrais au cou
saisir le drôle,
chasser bien loin
cette horrible face.
Vois comme, Mime, je t’aime !
Étant si sage,
tu vas m’instruire
d’un point que je cherche en vain.
Par les bois j’erre
pour fuir ta face :
qu’ai-je qui me lait revenir ?
Toute bête m’est plus chère que toi.
Nids aux branches, poissons au ruisseau,
rien ne me fâche, hormis de te voir !
Mais qu’ai-je donc pour revenir ?
Toi qui sais, apprends-le moi !