Page:Wagner - L’Anneau du Nibelung, trad. Ernst.djvu/32

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s’amusent à jeter des cris aigus et se séparent brusquement, et d’un élan s’élèvent dans diverses directions.

Les Trois Filles du Rhin.
–––––––Heia ! Heia ! Heiahahei !
––––––––––Gare à vous !
––––––––––le Gnome rugit !
––––––––––sous ses bonds les eaux
––––––––––ont rejailli :
–––––––l’Amour le rend insensé !

(Elles rient, dans la folie de leur excessive confiance.)

Alberich.

(sur la pointe du récif, étendant la main vers l’Or).

––––––––––Sans peur encor ?
––––––––––Riez aux ténèbres,
––––––––––filles des flots !
–––––––Ce feu, moi, je l’éteins ;
–––––––j’arrache au rocher cet Or,
–––––––forgeant ma vengeance en l’Anneau :
––––––––––car l’onde l’entend —
–––––––tel, j’abjure l’Amour !

Avec une épouvantable puissance, il arrache l’Or au récif, et précipitamment se rue avec lui aux profondeurs de l’abîme, où il disparaît rapidement. D’épaisses ténèbres nocturnes envahissent soudain tout le fleuve. Les Filles plongent éperdûment vers les profondeurs, à la poursuite du larron.

Les Filles du Rhin.
––––––––––Sus à ce traître !
––––––––––L’Or, sauvez l’Or !
––––––––––Aide ! Aide !
––––––––––Las ! Las !

Les eaux semblent descendre avec elles aux profondeurs : tout en dessous, au lointain, éclate le rire moqueur et brutal d’Alberich. — Les récifs disparaissent au plus épais des ténèbres ; du haut en bas, toute la scène est emplie d’un grand mouvement d’ondes noires, qui, pendant quelque temps, paraissent continuer à descendre.