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Page:Wagner - La Tétralogie de l’Anneau de Nibelung, 1894.djvu/49

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AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR

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faite (1). Ce musicien, ce dramaturge, Wagner l'était-il ? Pas encore. Eh bien donc, il fallait essayer de le devenir, les Richard Wagner, non plus que tel de ses indignes traducteurs, n’étant de ceux qui savent reculer devant le péril de manifester, à la face d’un monde de mensonge, leur foi militante en la Vérité.

Tout d’abord, dés le Vaisseau-Fantôme inclusivement (duquel vers et musique, excepté l’ouverture, furent terminés en sept semaines, aussitôt après Rienzi, et qui, dans sa pensée première, ne devait avoir qu’un seul acte), Wagner, décidé à changer de sujets, abandonna, une fois pour toutes, le terrain, comme il dit, de l’Histoire, pour s’établir sur le terrain, plus musical, de la Légende. Pourquoi ? Mais à seule fin de pouvoir laisser de côté l’infini « détail nécessaire pour représenter et décrire le fait historique et ses accidents, » tout l’infini détail « qu’exige, pour être par- faitement comprise, une époque spéciale et reculée de l’histoire, et que les auteurs de drames et de romans historiques déduisent, par cette raison » fatale, « d’une manière si circonstanciée (2). » Et si, cet infini détail, Wagner tenait tant à le « laisser de côté », c’est que l’obligation d’en tenir compte équivalait. à celle, plus grave, de traiter dans son Drame la partie poétique, la partie musicale surtout, suivant un mode incompatible, à ses yeux, avec chacune d’elles, et principalement avec la dernière. Car, pour la partie poétique : le seul tableau de la vie humaine qui doive être appelé poétique est celui dans lequel les motifs, qui n’ont de sens que pour la raison, sont remplacés par les mobiles tout humains qui gouvernent le cœur (3). Et, pour la partie musicale : qui ne comprend que si l’Histoire, les

(1) Cf. Lettre sur la Musique, éd. nouv., p. XXI.

(2) Id., pp. L VII-LVIII.

(3) Id., p. XXXI.