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AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR

Drames au concert ? Et c’est comme musicien, par les concerts, que lui, Artiste, et non « compositeur », Dramaturge, et non « musicien »[1], dédaigneux de semblables succès profanateurs de son Œuvre une, s’est progressivement imposé chez nous ! Wagner n’était-il pas l’ennemi, n’a-t-il pas été toute sa vie l’ennemi de notre conception du Théâtre et des théâtres-de-musique ? En Allemagne aussi bien qu’en France et n’importe où, n’a-t-il pas toute sa vie lutté contre les conventions modernes, lutté contre les directeurs, lutté contre les interprètes, contre les publics et le Public ? C’est qu’il désirait, avant tout, c’est qu’il exigeait, avant tout, la vérité, encore, toujours, la vérité dans l’expression ; et que si dès sa jeunesse, non maître alors de soi, il la sentait, cette vérité, la désirait, cette vérité, et l’exigeait, cette vérité, quand il faisait jouer les opéras de Mozart, de Glück, et même de Bellini, – à plus forte raison plus tard, en pleine possession de son être artistique, de ses idées et de ses moyens, en l’absolue conscience d’avoir réalisé son idéal complet du Drame, il se devait de réclamer, pour ce Drame idéal, sinon

  1. C’est-à-dire : autre chose que « musicien » , tout court : cet Avant-Propos me fera comprendre ! – Il peut être amusant de rappeler, tout en ayant de si bonnes raisons d’être d’un avis différent, que dans une de ses lettres à Liszt (Briefwechsel zwischen Wagner und Liszt, 1er janvier 1858) Richard Wagner, au moment même où il composait Tristan und Isolde, cette surhumaine page musicale, parlait, avec tranquillité, de sa personnelle inaptitude aux langues étrangères, comme – « à la musique… »