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WOTAN

Tu voyais déjà, dans tes rêves, tout ce qui vit, tout ce qui vibre, le Monde, en la puissance : et le voici captif, impuissant, solidement garrotté, hagard, devant moi ; tu ne peux pas le nier. Tu veux le libérer ? soit : il faut payer rançon.

ALBERICH

Niais que je fus ! fou chimérique ! M’être aussi bêtement laissé prendre à leurs impostures de voleurs ! Qu’une effrayante vengeance venge ma credulité !

LOGE

Si tu veux te venger, libère-toi d’abord : nul homme libre, à l’homme garrotté, ne rendra compte de ses outrages. Donc, si tu veux te venger : d’abord, sans tarder, songe à ta rançon ![1]

ALBERICH, brusquement.

Hé bien, parlez : qu’exigez-vous ?

WOTAN

Le Trésor et ton Or clair[2].

ALBERICH

Cupide canaille d’escrocs ! (A part :) Pourvu que je garde l’Anneau, seulement, peu m’importe, en somme, le Trésor : par l’Anneau, n’en aurai-je pas vite, à volonté, un autre,

  1. « Odin envoya Loki à Schwarzalfenheim. Celui-ci se rendit auprès du nain Andwari, qui nageait dans l’eau sous forme de poisson. Loki le saisit, le retint et lui demanda pour rançon tout l’or qu’il possédait dans ses rochers, et c’était un immense trésor. » (Edda de Snorro).
  2. « Alors Loki parla ainsi : « … Sauve maintenant ta tête des rets de Hel et livre-moi la flamme des eaux, l’or brillant. » (Sigurdakvidha Fáfnisbana önnur.)