Page:Wagner - Lettres à Auguste Rœckel, 1894, trad. Kufferath.djvu/67

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tout à fait en possession de moi-même. — Gœthe était autre ; je ne lui envie pas son calme ; et, du reste, je ne voudrais changer avec personne, même pas avec Humboldt, que tu tiens pour un génie, ce que je ne puis faire. Au bout du compte, tu en es là peut-être aussi ; tu ne voudrais changer avec personne, et au fond, tu aurais bien raison, — pour moi, tout au moins, je t’admire sincèrement. La nature n’est pas aussi éloignée de moi que tu le crois, encore que je ne sois plus en situation de me mettre scientifiquement en rapport avec elle. Mais Herwegh (1) me sert d’intermédiaire. Herwegh vit ici et se livre à une étude approfondie des sciences naturelles : par lui, l’ami, j’apprends des choses fort belles et très importantes sur la nature ; et celle-ci me guide en beaucoup de points. Seulement, quant

(1) Georges Herwegh, né à Stuttgart en 1817, mort à Bade en 1875, poète et homme politique, auteur des Chants d’un vivant qui eurent an énorme retentissement peu avant 1840 et dans lesquels il chantait l’Allemagne unie et libre. Tour à tour poursuivi ou appuyé par les autorités, il finit par se réfugier à Paris où il vécut de 1843 à 1848 dans le milieu de Georges Sand, Henri Heine, Béranger, etc. Là, il se lia aussi avec Bakounine et Herzen. En 1848, à la tète d’une colonne de patriotes, il pénétra dans le grand duché de Bade pour y pro- clamer la République. Mais sa bande de partisans fut défaite et il dut fuir pour échapper à la répression. C’est en Suisse qu’il alla se réfugier, à Zurich, où il se rencontra naturellement avec Richard Wagner.