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AIR DU PÂTRE DANS LE « VENUSBERG »

voir. En même temps, je me délectais à la pensée que peut-être quelqu’un m’apercevait ainsi de loin et tremblait d’épouvante.

C’est là que dans mon calepin je notai le plan détaillé d’un opéra en trois actes, le Venusberg. Plus tard, en écrivant le libretto, j’ai suivi exactement ce plan.

À l’une de mes escalades de la Wostrai, j’entendis soudain, au tournant du vallon, un pâtre qui, étendu dans l’herbe, sur une hauteur, sifflait un joyeux air de danse champêtre. Je me figurai aussitôt que je me trouvais dans le cortège des pèlerins qui passent dans la vallée, près du berger. Cependant il me fut impossible de me rappeler plus tard la mélodie du pâtre et je dus m’aider moi-même, selon ma méthode habituelle. Riche de ce butin, je retournai en bonne santé et de la meilleure humeur du monde à Tœplitz où je reçus bientôt l’intéressante nouvelle que Mme Schrœder-Devrient et Tichatschek allaient rentrer à Dresde. Cela me décida à y retourner aussi : je craignais moins de manquer la mise à l’étude de Rienzi que de voir la direction se décider à prendre autre chose sur son programme. Laissant donc Minna quelque temps encore dans la société de ma mère, j’arrivai à Dresde le 18 juillet. Je louai un petit logis dans une maison singulière, démolie depuis, qui donnait sur l’allée Maximilien ; puis je me hâtai de me mettre en rapports avec les principaux artistes de l’Opéra. Mon ancien enthousiasme pour Mme Schrœder-Devrient se ranima. Je l’entendis fréquemment sur la scène. La première fois, ce fut dans Barbe-Bleue de Grétry et j’éprouvai une impression bi-