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— VII —

Les compositeurs allemands devaient aller en Italie pour y apprendre à composer des opéras. Plus tard les théâtres, pour contenter le public, joignirent à cela l’exéoution d’opéras traduits, entre autres d’opéras français. Les essais d’opéras allemands n’étaient qu’une simple imitation d’opéras étrangers, ils n’avaient d’allemand que la langue. Nulle part ne se forma un théâtre central, un théâtre modèle. Tous les styles coexistaient dans la plus complète anarchie, style français, style italien, imitation allemande de l’un et de l’autre ; ajoutez encore des tentatives pour faire de la vieille pièce avec chant, qui ne s’était jamais élevée au genre populaire et indépendant, tentatives presque toujours vaincues par la prééminence des formes techniques, telles qu’elles venaient de l’étranger. Sous ces influences et dans cette confusion naissait un inconvénient des plus visibles, je veux dire l’absence absolue de style dans les représentations d’opéra. Dans des villes d’une population restreinte, où le théâtre ne trouvait qu’un public rarement renouvelé, pour donner au répertoire l’attrait de la variété, on représentait coup sur coup, aux intervalles les plus rapprochés, des opéras français, italiens, des opéras allemands, imitations des deux genres, ou bien issus des pièces avec chant les plus vulgaires ; sujets comiques, sujets tragiques, tout était chanté, joué par les mêmes chanteurs. Des morceaux composés pour les premiers virtuoses italiens, appropriés à leurs qualités personnelles, étaient chantés par des chanteurs sans étude et sans exercice, dans une langue d’un génie diamétralement opposé à celui de la langue italienne, et ils étaient défigurés de la façon la plus ridi-