Page:Wagner - Quinze Lettres, 1894, trad. Staps.djvu/41

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quille et solitaire. On pouvait s’y retrouver seul à seul avec soi-même. Lorsque l’homme qui pense et qui est instruit, peut disposer librement de son temps et de sa pensée, des trésors de connaissances s’ouvrent pour lui ; les livres, ces discrets amis, élèvent la voix, quand ils pénètrent jusqu’au fond de l’être et qu’ils sont jugés dignes de devenir des compagnons de chaque jour.

Puis, c’était un profond soulagement que le repos après toutes les tempêtes que nous avions traversées, après les discussions d’opinions et la guerre des partis, qui ne laissent plus subsister la vieille harmonie de la vie de famille, qui ne permettent plus aux amis d’être assis tranquillement à la même table, qui poussent même les plus proches et les plus aimés à se lancer des paroles offensantes.

Mes pensées allaient pourtant bien souvent chercher mes bien-aimés, parents, frères, sœurs. Le mal du pays n’est pas seulement l’aspiration du Suisse vers sa montagne ; nous pouvons aussi en parler, nous autres, enfants de la plaine ! Il y avait des heures où j’entendais dans mes rêves le mugissement de la mer, où le ciel gris me manquait, où j’avais la nostalgie de la plaine par-dessus laquelle le vent chevauche, en chantant toutes ses folles