Page:Wagner - Souvenirs, 1884, trad. Benoît.djvu/165

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
151
MES SOUVENIRS SUR SPONTINI

sur Spontini ; je m’attachai à faire ressortir à son sujet ce point particulier : Spontini, bien différent en cela de Meyerbeer, qui fait actuellement la loi dans le monde musical, et de Rossini, dont la vieillesse se prolonge encore aujourd’hui, s’est distingué par une foi sincère en son art et en son propre génie. Que cette foi, ainsi que j’en dus faire l’épreuve presque désolante, eût dégénéré en une superstition fantastique, ce fut là ce que je n’eus pas le courage d’ajouter.

Je ne me souviens pas d’avoir trouvé, dans mes dispositions d’alors à Dresde, l’occasion de réfléchir plus à fond sur les impressions extrêmement singulières que je reçus de ma curieuse rencontre avec Spontini, et d’avoir eu quelque peine à les faire accorder avec la haute estime que j’éprouvais pour ce grand maître, et qui, somme toute, n’avait pu que s’accroître. Évidemment je n’avais eu sous les yeux que sa charge ; avec l’âge, et par une prodigieuse exagération de la conscience