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SOUVENIRS

l’esquisse d’un sujet d’opéra, avec la proposition de le traiter pour son compte au cas où il lui plairait, et de me procurer la commande d’en faire un opéra pour Paris. Naturellement Scribe n’en avait fait aucun cas. Néanmoins, je n’abandonnai pas mes projets ; bien plus, dans l’été de 1830, je les repris activement ; bref, je décidai ma femme à s’embarquer avec moi à bord d’un voilier qui devait nous conduire jusqu’à Londres. Cette traversée restera pour moi éternellement inoubliable ; elle dura trois semaines et demie, et fut féconde en accidents. Trois fois nous eûmes à subir la plus violente tempête et, dans un des cas, le capitaine se vit forcé de se réfugier dans un port norwégien. Le passage à travers les brisants des côtes norwégiennes produisit sur mon imagination une impression merveilleuse. La légende du Hollandais errant, telle que j’en reçus confirmation par la bouche des matelots, revêtit en moi une couleur tranchée, spéciale, que purent seules lui prêter les aventures par moi courues.