Page:Wailly - Éléments de paléographie, I.djvu/181

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

DEUXIÈME PARTIE.

STYLE, NOMENCLATURE, FORMULES, ETC.


CHAPITRE PREMIER.

COURTES OBSERVATIONS SUR LES LANGUES VULGAIRES ET L’ALTÉRATION DE LA LANGUE LATINE DANS LES MONUMENTS DU MOYEN ÂGE.

Parmi les connaissances qui se rattachent à la Paléographie, il n’en est pas peut-être qui offre à la fois plus d’intérêt et d’utilité que la linguistique. Aussi regrettons-nous vivement de ne pouvoir indiquer ici les principes élémentaires de cette science appliquée aux différents langages qui ont été employés en France depuis l’invasion des Barbares. Mais ce travail exigerait un ouvrage spécial, et d’ailleurs il serait au-dessus de nos forces. Nous nous bornerons donc à présenter un petit nombre d’observations générales.

Autrefois le grec et le latin étaient à peu près les seules langues dans lesquelles on dressât les actes publics. L’usage du grec était assez répandu dans le midi de la France, avant l’invasion des Barbares. Du xie siècle au xve, cette langue ne fut pas moins employée que le latin dans les royaumes de Naples et de Sicile. À Constantinople le latin fut la langue officielle, surtout depuis la translation de l’empire dans cette ville. Mais en 602 le tyran Phocas prescrivit l’usage du grec dans les écoles et dans les tribunaux. Le reste de l’Europe rédigeait les actes en latin. Les Anglo-Saxons furent les premiers à employer concurremment avec le latin leur langue nationale, que l’on rencontre dans les actes depuis le viiie siècle jusqu’au xiiie. On sait que, depuis la conquête des Normands, le français vint se mêler au langage des vaincus, et la lutte de ces deux idiomes est un symbole vivant de l’antipathie qui sépara si longtemps les deux populations. En 1362, Edouard III abandonnant la politique de ses prédécesseurs qui avaient fait du français la langue officielle, en interdit l’usage dans les actes publics, et réhabilita la langue naturelle du pays. Il est donc facile de concevoir qu’an-