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Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t1.djvu/135

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Un soleil embrumé qui mourait sans splendeur !
C’était un vieux soleil des derniers soirs d’automne,
Globe d’un rouge épais, de chaleur épuisé,
Qui ne faisait baisser le regard à personne
Et qu’un aigle aurait méprisé !

II

Alors, je me disais, en une joie amère :
« Et toi, Soleil, aussi j’aime te voir sombrer I
Astre découronné, comme un roi de la terre,
Tête de Roi tondu que la nuit va cloîtrer ! »
Demain, je le sais bien, tu sortiras des ombres ;
Tes cheveux d’or auront tout à coup repoussé.
Qu’importe ! j’aurai cru que tu meurs quand tu sombres !
Un moment, je l’aurai pensé !

III

Un moment, j’aurai dit : c’en est fait : il succombe,
Le monstre lumineux qu’ils disaient éternel,
Il pâlit comme nous, il se meurt, et sa tombe
N’est qu’un brouillard sanglant dans quelque coin du ciel.
Grimace de mourir, grimace funéraire,
Qu’en un ciel ennuité chaque jour il fait voir…
Eh bien, cela m’est doux de la sentir vulgaire,
Sa façon de mourir, ce soir !

IV

Car je te hais, Soleil ! oh ! oui, je te hais, comme
L’impassible témoin des douleurs d’ici-bas…
Chose de feu, sans cœur, je te hais, comme un homme !
L’être que nous aimons passe, et tu ne meurs pas !
L’œil bleu, le vrai soleil qui nous verse la vie,
Un jour perdra son feu, son azur, sa beauté,
Et tu l’éclaireras de ta lumière impie,
Insultant d’immortalité !

V

Et voilà, vieux Soleil, pourquoi mon cœur t’abhorre !
Voilà pourquoi je t’ai toujours haï, Soleil !
Pourquoi je dis le soir, quand le jour s’évapore :
" Ah ! si c’était sa mort, et non plus son sommeil ! 8
Voilà pourquoi je dis, quand tu sors d’un ciel sombre :