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VIII
ANTHOLOGIE DES POÈTES FRANCAIS

ce n’était pas une réforme, mais une exploitation scrupuleuse des ressources que leur offraient ces règles pour exprimer leurs pensées et leurs sentiments le plus poétiquement possible. Au fond, cette visée est celle de tout poète ; elle ne se distinguait chez eux que par cela seul qu’elle était réfléchie, dominante, ombrageuse. Comme je fus un des collaborateurs du Parnasse Contemporain, j’en connais l’origine et la tendance, et, en ce qui me concerne du moins, je n’ai pas souvenance qu’il y ait eu entre nous un accord préalable, une sorte de conjuration délibérée pour combattre le vers facile à l’excès, c’est-à-dire lâche et sans consistance, fluide comme l’eau claire, informe comme elle. Nous avions tous individuellement le même souci d’une facture soignée, et nous nous sommes rencontrés sans nous chercher. L’idée ne nous venait même pas qu’on pût discuter les lois de la poétique traditionnelle. Nous les acceptions aveuglément et nous n’éprouvions pas le besoin de modifier ni d’accroître les moyens que nous y trouvions de rendre exactement nos états moraux, si complexes et personnels qu’ils pussent être. La révolte de Victor Hugo contre le vieux moule de l’alexandrin ne nous scandalisait pourtant pas, car ce moule, sans changer de longueur, sans augmenter ni diminuer le nombre des syllabes, comporte une division ternaire qui permet de ne le pas couper en son milieu par l’hémistiche consacré et d’y reconnaître deux points d’appui au lieu d’un pour la voix. Il admet deux sortes de division qui représentent une ou deux césures