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chantées sur un mode toujours élevé, entre ciel et terre, comme le vol des cygnes qui ne s’abaisse pas même quand leur aile s’ensanglante d’uue blessure… Il est là tel sonnet que les amants de tous les âges à venir, même les plus lointains, aimeront à relire, où ils retrouveront leur propre pensée et leur propre rêve, comme le doux André Chénier souhaitait qu’il en fût de ses vers d’amour… »

Dans le dernier livre de M. Auguste Angellier, Le Chemin des Saisons, l’art du poète s’avère singulièrement délicat et puissant. Il y a dans ce recueil, à côté de petits poèmes adorableiuent badins, des pièces qui étalent un beau luxe de couleurs chatoyantes, et telles mélodies tissées de grâce et de tendresse ; il y a, surtout, de l’émotion, uue émotion profonde, étrangement communicative, et que ue cache point, mais qu’avive plutôt, par endroits, la splendeur du coloris.

LES CARESSES DES YEUX SONT LES PLUS ADORABLES…

Les caresses des yeux sont les plus adorables ;
Elles apportent l’âme aux limites de l’être,
Et livrent des secrets autrement ineffables,
Dans lesquels seuls le fond du cœur peut apparaître.

Les baisers les plus purs sont grossiers auprès d’elles ;
Leur langage est plus fort que toutes les paroles ;
Rien n’exprime que lui les choses immortelles
Qui passent par instants dans nos êtres frivoles.

Lorsque l’âge a vieilli la bouche et le sourire
Dont le pli lentement s’est comblé de tristesse,
Elles gardent encor leur limpide tendresse ;

Faites pour consoler, enivrer et séduire,
Elles ont les douceurs, les ardeurs et les charmes !
Et quelle autre caresse a traversé des larmes ?

[A l’Amie Perdue.)