Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t3.djvu/488

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Alors, un blanc rayon lunaire les atteint,
Du haut des toits de fer où l’astre vient d’éclore…
Et c’est un peu, déjà, le présage lointain
D’une mystérieuse et triomphale aurore !

ÉVANGILE

Toi qui gémis, pourquoi douloureux, ô mon frère ?
Pourquoi suivre la route où s’égarent tes pas ?
Sans doute tu perdis une illusion chère,
Et c’est elle aujourd’hui que tu pleures tout bas ?

O mon frère, pourquoi douloureux, toi qui passes
Je le lis dans tes yeux, ton orgueil a souffert ;
Et rien qu’à voir tes mains inhabiles et lasses,
Je devine ton cœur plus morne qu’un désert.

Allons, relève-toi, ne penche pas la tête !
Si tu veux, tu seras un homme neuf, demain ;
Et je te guiderai vers le labeur honnête,
Car nous avons tous droit au travail comme au pain.

Un rayon de soleil te guérira peut-être,
Et si ta bouche a soif, et si ta chair a faim,
Frère, voici le sol où nos bras feront naître,
Pour ta faim, le froment, et pour ta soif, le vin.

Regarde : autour de nous s’épanouit la vie,
La vigne croit, le blé jaunit, le fruit est mûr :
La Terre, cette amante encore inassouvie,
Kous réclame pour la féconder sous l’azur.

Les épis moissonnés vont déborder des granges,
Les grappes rougiront de leur sang le pressoir :
Mon frère, nous allons créer pour que tu manges,
Et nous allons semer des floraisons d’espoir !

SEMAILLES

La ville jette au ciel sinistre sa clameur
— Cris d’abattoir, clairons sonnants, fracas d’usine —
Mais voici l’heure enfin solennelle et divine,
Et tout ce qui fut doux en moi palpite et meurt.