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OR, L’ÉTANG D’ELSENEUR...

IX

Pour mirer ta pâleur, à tout jamais de morte,
Les eaux sont encore trop vives qui s’endorment,
Il faut fuir les étangs qu’autrefois nous aimâmes
Et plus loin s’enfoncer dans l’exil, ô mon âme.

Après l’eau des ruisseaux, — ô notre enfance neuve, —
Le blanc ruissellement des torrents, puis des fleuves,
Et l’immobilité des lacs couleur de perle,
Après le triste étang où stagnent les eaux vertes,
Où vas-tu, ma Folie, courber ton doux visage ?
Ta tristesse fuira en pleurs dans quelles glaces !

Si tu veux, nous irons vers celles où le verre
Garde en ses doigts secrets l’eau d’argent prisonnière,
Et là, nous arrêtant auprès de la captive
Qui ne pourra jamais, par quelque nuit, furtive,
Se glisser hors des rets rigides qui l’enserrent,
Nous parlerons à cette sœur de notre peine, —
Et l’eau qui s’est, jadis, en ce miroir gelée,
En qui toute la vie du monde est reflétée,
Sans qu’elle y puisse, un seul instant, mêler la sienne,
L’eau qui souffre de tous ces liens qui la retiennent
Et l’empêchent d’aller, ainsi que font les autres,
Vivre la vie du fleuve ou des cascades hautes,
L’eau qui, vive et joyeuse, en ce miroir enclose,
S’est faite grave et semble morte à toutes choses,
L’eau qui souffre et s’émeut en silence, ô mon âme,
Sans doute comprendra la raison de tes larmes !

(La Floraison des Eaux.)


TOI, TU RIAIS...

Toi, tu riais, levant les yeux vers le miroir
Où s’animait d’un peu de rouge ton visage.
Moi, je fermais les yeux afin de ne pas voir
Ce beau couchant cruel sur ton doux paysage.