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auguste.

— Eh bien ! après, s’écrièrent Laure et Amélie : c’est toi qui t’interromps cette fois.

— Fifine, reprit Auguste en tâchant de ne pas trembler, lorsqu’elle est arrivée à cet endroit-là, s’est arrêtée aussi. Je crois qu’elle avait peur… mais je n’ai pas peur, moi ! et je vais continuer. Si bien donc que tout à coup la veilleuse s’éteignit, et un léger bruit se fit entendre ; c’était comme quelque chose qui glisse le long du mur, et se laisse tomber par terre !

— Ah ! mon Dieu ! s’écria Amélie en se rapprochant de sa sœur.

— Je savais bien, reprit Auguste, que cela te ferait peur ! juge de la frayeur d’Ernest ! ses cheveux se dressèrent sur sa tête, son cœur battit bien fort, et il voulut se coucher et se cacher, comme Henri, sous la couverture ; mais ses mains tremblaient, et jamais il ne put trouver l’entrée de son lit. Il était au pied, qu’il se croyait à la tête, et faisait de vains efforts pour entr’ouvrir la couverture et se glisser dans ses draps. Cependant il entendait marcher comme quelqu’un qui serait venu droit à lui, mais ce n’était point précisément des pas ; cela ressemblait à quelque chose qu’on pousse, et qui frôle le parquet en glissant dessus tout doucement. Ernest avait caché sa tête dans ses mains, quoique l’obscurité fût bien grande, quand voilà que tout à coup il entend distinctement ces mots : Regarde-moi !… Et malgré lui il écarte ses doigts et reste immobile, les yeux fixes et la bouche ouverte : il voulut crier pour appeler son papa et sa maman, et il ne le put pas, tant la peur lui ôtait la respiration…

— Mais qu’est-ce donc qu’il voyait ! dis-le donc vite ! s’écria Laure à son tour.

— Ce qu’il voyait ? reprit Auguste en grossissant la voix, qui faiblissait malgré lui ; il voyait… il voyait le portrait !…