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PROTECTRICES DES ANIMAUX.

exactement avec la pierre, l’écorce, la feuille, ou la fleur, sur laquelle ils se tiennent habituellement, et qui de cette façon échappent à tous les regards. Avançons d’un pas encore, et nous avons des insectes que leurs formes et leurs couleurs font ressembler exactement à certaines feuilles, ou fleurs, ou à certains bois, à telle branche moussue ; et, dans ces cas, des habitudes et des instincts très-particuliers viennent aider à l’illusion et assurer à l’animal plus complètement encore le secret dont il a besoin.

Puis nous voyons les phénomènes entrer dans une phase nouvelle : des êtres nous apparaissent, que leurs couleurs ne cachent point et ne rendent nullement semblables à des substances minérales ou végétales, au contraire ils sont très-apparents ; mais leur apparence extérieure les fait ressembler exactement aux représentants d’un groupe très-différent, tandis qu’ils diffèrent beaucoup de ceux auxquels ils sont d’ailleurs alliés par tous les points essentiels de leur organisation. On dirait des acteurs, des comédiens habillés et peints pour quelque farce, ou bien des fripons qui cherchent à se faire passer pour des membres connus et respectables de la société. Que signifie cet étrange travestissement ? Est-ce que la nature descend jusqu’à l’imposture et à la mascarade ? Non pas, ses principes sont trop sévères ; chaque détail de ses œuvres a son utilité. La ressemblance d’un animal avec un autre est un phénomène essentiellement de même nature que la ressemblance de tel autre à une feuille, à une écorce, ou au sable du désert, et tend au même