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L’INSTINCT CHEZ L’HOMME ET LES ANIMAUX.


Comment les Indiens voyagent au travers de forêts inconnues et sans chemin battu.


Considérons maintenant le fait que les Indiens trouvent leur chemin à travers des forêts qu’ils n’ont jamais traversées auparavant. Ce fait est très-mal compris ; je crois qu’il n’a lieu que dans des conditions très-spéciales, qui montrent que l’instinct n’y est pour rien.

Le sauvage, il est vrai, peut trouver son cheminé à travers les forêts de son pays natal, dans une direction toute nouvelle pour lui ; mais cela tient à ce que, depuis l’enfance, il est habitué à les parcourir, s’orientant au moyen de signes qu’il a observés lui-même ou que d’autres lui ont appris. Les sauvages font de longs voyages dans beaucoup de directions, et toutes leurs facultés étant employées à ce seul objet, ils acquièrent une connaissance complète et exacte de la topographie, non-seulement de leur propre district, mais encore de toutes les régions environnantes. Celui qui a voyagé dans une direction nouvelle, fait part aux autres de ce qu’il a appris, et les descriptions des routes, des localités, des petits incidents du voyage, forment l’une des principales ressources de la conversation ; le soir autour du feu, chaque voyageur, chaque prisonnier appartenant à une autre tribu, vient ajouter son contingent de renseignements. Comme l’existence même des individus, des familles et des tribus dépend de cette connaissance de la nature, toutes les facultés subtiles du sauvage