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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/101

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l’existence des peintres gothiques dans les vieilles cités flamandes.

Recueilli comme eux dans la sereine observation des choses, il aimait les recoins sombres où plane une tristesse. La nature évoquée à ses yeux n’était point bruyante ; au contraire, elle semblait assoupie en de longues méditations accumulées, et l’on éprouvait, à voir ses tableaux, l’impression que donnent les cathédrales immenses où l’on s’écoute marcher au milieu de la sonorité des colonnes.

De fait, Marius aimait les temples. Lors de son séjour à Rome, il s’était pris de passion pour la cité sainte dans ce qu’elle a de pieux et d’austère.

Quelle grandeur pensive dans les églises vides ! Les pierres de l’ogive semblent soupirer, le bruit des dalles roule, agrandi, à travers les galeries ; un rais de soleil incendié de rouge par une verrière, griffe le sol ; au fond de leurs niches tapissées de vieil or, les saints porte-clefs et les apôtres porteglaive se dressent dans leurs manteaux à plis droits, et, au fond du chœur, prosterné sur la dernière marche de l’autel, quelque moine brun balbutie des prières. Une lumière chaude et rousse baigne toutes choses ; les colonnes entrecroisent leurs ombres ; la lampe du tabernacle crépite et bouge ; une cloche tinte, un long écho se répercute comme un appel d’âmes, et l’âme à l’unisson s’anéantit dans la troublante admiration du Beau.

L’église avait déterminé la direction artistique de Marius. Il avait compris, dans une soudaine révélation, la magie des vieux maîtres, la couleur éclatante et douce des tryptiques