De jour en jour, ce changement se faisait plus visible chez Greta ; l’enfant devenait femme, et avec la floraison rose des dix-sept ans, surgissait une gravité mêlée d’irrésistible grâce. Son esprit et son corps s’épanouissaient comme un pur lys blanc, dans la montée de deux sèves matérielle et spirituelle.
A la faiblesse ployante des premières branches se substituait, de minute en minute, une vigueur de rameau vert, et l’heure était venue où l’être se sent traversé d’une ardeur inconnue et d’un frisson nouveau.
Un matin, après le déjeuner, le professeur étant, comme toujours, remonté à son travail, Greta retint par la manche Ferrian, qui s’apprêtait à sortir.
— C’est aujourd’hui, à trois heures, le concert Strauss. Nous irons, n’est-ce pas ? dit-elle.
— Mais… j’avais l’intention d’aller à Cologne… cependant…
— Oh ! oui, restez, monsieur Jacques, insista la jeune fille, on jouera des valses et, moi à votre bras, nous nous figurerons que nous sommes au bal et que nous dansons ensemble.
Elle avait la voix émue en disant cela, et Ferrian, pour la première fois, vit en elle la femme, captivante et caressante à la fois, qu’il avait formée.
— Oui, j’irai avec vous, Greta, fit-il lentement ; vous me donnerez le bras… et je serai bien heureux.
Elle rougit, surprise, tandis qu’il continuait :
— Oui, bien heureux, Greta, de vous sentir près de moi,