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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/142

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ai choisie depuis bien longtemps, Greta, je vous ai appelée de toute ma voix intérieure depuis trois ans de mon existence. Si je suis allé en Allemagne, c’est pour me dérober à une vie qui m’obsédait ; j’aspirais à trouver une femme simple et douce qui m’aimât comme je me promettais de l’aimer ; je vous parle gravement, Greta ; souvent j’ai des spleens, vous ne me connaissez pas ; peut-être vous ferai-je souffrir quelque jour ; je vous le demande, soyez bonne pour le grand enfant qui vous prie de le soutenir ; soyez ma compagne, Gretchen, et si je vous fais pleurer parfois, je vous le promets, je tâcherai, par ma tendresse, de vous faire oublier mes défaillances.

Greta le regardait pendant ce temps, l’œil humide ; elle prenait confiance, heureuse presque de ce qu’il ne se fit pas valoir et que déjà, sans qu’elle le demandât, il se prît à avouer les secrets de sa conscience. Elle éprouva une jouissance ineffable à se dire qu’elle aurait à lui pardonner quelque chose, à se sacrifier pour lui, à mettre sa douceur sur les plaies de ce fantasque qui souvent semblait rire — et pleurait.

Elle souriait à présent, et, heureux, rassérénés, oubliant leur remords déjà lointain à leur égoïsme d’amour, ils eau* sèrent tranquillement comme des amis, arrangeant d’avance leur vie à venir, leur « chez soi ». Lui racontait ce qu’il voulait, son idéal apaisé de vie bonne ; elle, radieuse, avait fait le même rêve ; elle lui dit sa vie, comment elle avait été élevée, dans le goût des choses simples, sans ambitions qu’une famille…

Et leurs pensées ravies dans une ascension de joie future oubliaient déjà le jour passé, la veille d’effroi, la malédiction