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Page:Waller - Lysiane de Lysias, 1885.djvu/71

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auteurs, avec une complaisance raffinée, elle éprouvait aussitôt une réaction de volonté puissante et despotique. Lorsque, seule dans sa vaste chambre aux lourdes tentures, elle se dévêtait, ayant encore, imprégnée en l’imagination, la dernière lecture interrompue, elle chassait d’un geste les scènes fatales, écartait l’excitation charnelle, et s’endormait n’ayant dans l’âme que la reconquête au prix de laquelle était cette lutte vaillamment engagée entre les sens frémissants et le cœur torturé.

Des nuits, Christine se réveillait brusquement, au moment de succomber aux baisers calcinants du rêve. Des couples enlacés avaient surgi, râlant et meurtris par les morsures, des orgies byzantines inventées par les auteurs démoniaques s’étaient élevées dans la volupté des nuages, des accouplements étranges, où les membres en nœuds de serpents faisaient songer à quelque lutte inouïe, s’étaient roulés dans son cauchemar…

Alors, dans la lueur tendre de la veilleuse, l’Initiée se levait, droite, les cheveux déroulés sur la blancheur du linge, et, les yeux fixes, largement ouverts, regardait devant elle, quelque point brillant qui l’hypnotisait. L’heure tintante la sortait de son immobilité ! Elle baignait son front dans l’eau parfumée d’iris, allumait un candélabre et lisait quelques versets printaniers de la Bible ou des fragments des Védas traduits en une langue naïve et apaisante.

Puis la duchesse Christine de Perriane s’endormait, calme et le sourire aux lèvres.