Page:Walras - Introduction à l'étude de la question sociale.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’échange ou de l’économie politique, la tendance de Bastiat et de ses disciples n’est qu’une dissidence dans l’école économiste. C’est ce qu’il était, je crois, très-important d’établir nettement à l’heure qu’il est.

Le principe de la rareté se formule ainsi : — La valeur d’échange est un fait naturel qui a son origine dans la limitation en quantité des utilités, et sa mesure dans les circonstances comparatives de l’offre et de la demande.

Et si l’on appelle richesse sociale l’ensemble des choses qui sont tout à la fois : 1° valables, et 2° appropriables parce qu’étant utiles elles sont aussi limitées dans leur quantité, on tire du principe de la rareté la conséquence suivante : —La richesse sociale se divise en trois espèces : 1° La terre, 2° Les facultés personnelles des hommes, richesse naturelle ; 3° Le capital artificiel, richesse produite.

La première de ces deux propositions, aujourd’hui nettement formulée, permet de formuler immédiatement la seconde. Il faut dire à la gloire de l’école économiste que si elle a pour suivi longtemps infructueusement l’analyse philosophique du fait de la valeur et renonciation rationnelle du principe de la rareté, elle n’en a pas moins pour cela toujours trouvé dans l’observation consciencieuse, patiente et approfondie des faits une ressource suffisante pour constater la valeur d’échange de la terre et de son usage. Les physiocrates en premier lieu ; ensuite Adam Smith, David Ricardo, Scrope, Senior, MacCulloch, J.-B. Say ; MM. Auguste Walras, Blanqui, Joseph Garnier, Hippolyte Passy, se sont tous accordés à reconnaître que la fécondité productive du sol est appropriée, qu’elle se vend et s’achète ou qu’elle s’échange. La terre, richesse naturelle, don de Dieu, fait partie de la richesse sociale. Il s’agit donc enfin de constituer une théorie de la propriété qui concorde avec l’économie politique, et non de mutiler les faits naturels et de défigurer la science pour l’accommoder à l’étroitesse des principes moraux de M. Thiers.

Dans cette voie de sincérité et de courage, les économistes que je viens de mentionner, tous ceux qui, selon moi, ont su se transmettre l’un à l’autre les meilleures traditions scientifiques, nous précèdent encore.

Mac-Culloch. « Ce qu’on nomme proprement la rente, c’est la somme payée pour l’usage des forces naturelles et