Page:Walras - L’Économie politique et la justice.djvu/115

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L’échange réciproque, le respect réciproque, la justice, soit ! ce ne sont à tout prendre que des expressions barbares d’idées incomplètes. Quant au service réciproque, à l’escompte réciproque, au prêt réciproque ou crédit gratuit, ils ne sont pas plus difficiles à réaliser l’un que l’autre ; ils sont également impossibles.

Tout ce qu’on peut distinguer dans cet amas d’inepties, c’est que M. Proudhon conclut d’abord de la réciprocité, du respect à la réciprocité de prestation ; et ensuite de la réciprocité de prestation, ou prêt réciproque, au prêt gratuit.

Quelle envergure de syllogisme ! La réciprocité du respect est un principe de morale ; la réciprocité de prestation, quelle que puisse être cette chose indéfinie, se rattache à des faits d’échange de l’ordre naturel. Il n’y a donc aucun rapport possible ou impossible, réel ou imaginaire, de la majeure à la mineure. Mais de la mineure à la conclusion quel gouffre insondable ! De la réciprocité du respect à la réciprocité de prestation il y a loin comme du Kamschatka au cap de Bonne-Espérance ; cela est certain. Mais s’il fallait mesurer la distance qui sépare le prêt réciproque du prêt gratuit, ce ne serait point assez que d’appeler en comparaison l’éloignement du soleil et le la lune. Jugez-en !

Je suis capitaliste ; un travailleur vient me trouver ; cet homme n’a en tout et pour tout qu’un talent manuel : c’est un menuisier, si vous voulez. J’ai, moi, et je lui fournis, à lui, un atelier, des outils de toutes