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Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/150

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sans brossailles qui empêchassent le moins du monde qu’on n’y pût passer librement ; et la disposition irrégulière des hauteurs et des précipices, dans la partie Septentrionale de l’Ile contribuoit par cela même à former un grand nombre de Vallées, aussi belles qu’aucune de celles qu’on dépeint dans des Romans. La plupart de ces Vallées étoient arrosées de ruisseaux qui tomboient par cascades de rocher en rocher, quand le fond de la Vallée se trouvoit par la continuation des hauteurs voisines entremêlé de quelques endroits escarpés ; Il y avoit dans ces mêmes Vallées des endroits, où l’ombre, et l’odeur admirable qui sortoit des Bois voisins, la hauteur des rochers qui paroissoient comme suspendus, et la quantité de cascades transparentes, qu’on voyoit de tous côtés, formaient un séjour aussi charmant qu’il y ait peut-être sur toute la face de la Terre. Ce qu’il y a de certain, c’est que la simple Nature surpasse ici dans ses productions toutes les fictions de la plus heureuse imagination. Il n’est pas possible de dépeindre par des paroles la beauté du lieu, où le Commandeur fit dresser sà Tente, et qu’il choisit pour sa demeure. C’étoit une Clarière de médiocre étendue, éloignée du bord de la Mer d’un demi-mille, et située dans un endroit dont la pente étoit extrêmement douce. Il y avoit au devant de sa Tente une large avenue coupée à travers le Bois jusqu’à la Mer. La Baye avec les Vaisseaux à l’ancre paroissoit au bout de cette avenue, qui s’abaissoit insensiblement vers la Mer.

Cette Clarière étoit ceinte par derrière d’un Bois de grands Mirthes, rangés en forme de Théâtre, le terrain, que ce Bois occupoit, ayant plus de pente que la Clarière, et cependant pas assez pour que les hauteurs et les précipices, qui étoient plus avant dans le Païs, ne s’élevassent considérablement au-dessus des sommets des arbres, et n’augmentassent encore la beauté du coup d’œil. Pour qu’il ne manquat rien à la beauté de cet endroit, deux ruisseaux, dont l’eau étoit transparente comme le Cristal, couloient sous les arbres, qui environnoient la Clarière, l’un du côté droit de la Tente, et l’autre au côté gauche, à la distance d’environ cent verges. On aura au moins une foible idée de ce beau Païsage, si l’on jette les yeux sur la planche ci-jointe, où ce Païsage est représenté.

Par rapport aux Animaux, qu’on trouve ici, la plupart des Auteurs qui ont fait mention de l’Ile de Juan Fernandez, en parlent comme étant peuplée d’une grande quantité de Boucs et de Chèvres ; et l’on ne sauroit guère révoquer leur témoignage en doute à cet égard, ce lieu ayant été extrêmement fréquenté par les Boucaniers et les Flibustiers, dans le tems