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Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/149

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nous fournissoit, non seulement nous faisoient un extrême plaisir, après avoir été nourris si longtems de chair salée, mais étoient aussi admirables pour nos malades. Par ce moyen ils recouvrèrent peu à peu leur santé et leurs forces ; et pour ceux, qui se portoient bien, ces alimens chassèrent les semences cachées du Scorbut, dont probablement aucun de nous n’étoit entièrement exemt.

Outre les plantes, dont je viens de parler, nous y trouvames beaucoup d’Avoine et de Treffle. Il y avoit aussi quelques arbres à chou comme je l’ai dit ; mais comme ces sortes d’arbres étoient presque toujours sur le bord de quelque précipice ou dans d’autres endroits escarpés, et qu’il falloit couper un arbre entier pour avoir un seul chou, nous donnames rarement dans cette espèce de friandise.

La douceur du Climat et la bonté du terroir rendent cet endroit excellent pour toutes sortes de végétaux ; pour peu que la terre soit remuée, elle est d’abord couverte de Navets et de Raves. C’est ce qui engagea Mr. Anson, qui s’étoit pourvu de presque toutes les semences propres aux Jardins potagers, et de noyaux de différentes sortes de fruits, à faire semer des Laitues, des Carottes, et à mettre en terre dans les bois des noyaux de Prunes, d’Abricots, et de Pêches : le tout pour l’utilité de ses Compatriotes, qui pourroient dans la suite toucher à cette Ile. Ses soins du moins à l’égard des fruits, n’ont pas été inutiles ; car quelques Messieurs qui, en voulant se rendre de Lima en Espagne, avoient été pris et menés en Angleterre, étant venus remercier Mr. Anson de la manière généreuse et pleine d’humanité dont il en avoit agi envers ses prisonniers ; dont quelques-uns étoient de leurs parens, la conversation tomba sur ses expéditions dans la Mer du Sud ; et ils lui demandèrent à cette occasion s’il n’avoit point fait mettre en terre dans l’Ile de Juan Fernandez des noyaux d’Abricots et de Pêches, quelques Voyageurs, qui avoient abordé à cette Ile, y ayant découvert un grand nombre de Pêchers et d’Abricotiers, sorte d’arbres qu’on n’y avoit jamais vue auparavant ?

En voila assez au sujet du terroir et des productions de cette Ile, dont, à la première vue, nous nous étions formé de si désagréables idées. A mesure que nous en approchions davantage, elle s’embellissoit à nos yeux ; et l’espérance que nous conçumes que ce devoit être un lieu enchanté ne se trouva nullement trompée quand nous y eumes fait quelque séjour.

Les Bois dont la plupart des Montagnes escarpées sont couvertes, étoient