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Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/195

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l’état où nous étions, il ne nous étoit pas possible de résister à un Ennemi pourvu de tout, cette rencontre auroit apparemment été fatale, поn seulement à nous, mais aussi au Tryal, au Gloucester, et à la Pinque Anne, qui nous joignirent séparément, et qui, chacun, en particulier, étoient moins capables encore que nous de faire quelque résistance considérable. J’ajouterai simplement, que ces Vaisseaux Espagnols envoyés pour nous intercepter avoient été dispersés par une tempête, durant le tems qu’ils étoient en croisière, et qu’après leur arrivée à Callao, ils avoient été désarmés. Nos Prisonniers nous apprirent de plus, qu’en quelque tems qu’on reçût à Lima la nouvelle que nous étions dans ces Mers, il se passeroit au moins deux mois avant qu’on pût remettre une Escadre en mer.

Ce détail nous étoit à tous égards aussi favorable que nous le pouvions souhaiter, dans les fâcheuses circonstances où nous nous trouvions ; et il ne nous restoit plus aucun lieu de douter, que les jаггеs, fraîchement brisées, quelques monceaux de cendres, et les restes de Poisson, que nous avions trouvés en débarquant la première fois à l’Ile de Juan Fernandez, n’y eussent été laissés par les Espagnols, qui avoient croisé à la hauteur de ce Port. Notre curiosité sur les articles les plus importans étant ainsi satisfaite, nous fimes passer à bord du Centurion la plupart de nos Prisonniers, et tout l’argent, et fimes, vers les huit heures du soir, cours au Nord, en compagnie de notre prise. Le lendemain matin, à six heures nous découvrimes l’Ile de Juan Fernandez, où nous ancrames ensemble le jour suivant.

Les Espagnols du Carmelo, qui savoient tout ce que nous avions souffert, étoient très étonnés que nous eussions pu résister à tant de maux ; mais quand ils virent le Tryal-Sloop à l’ancre, leur étonnement redoubla, et ils eurent toutes les peines du monde à croire, qu’outre le travail que nous avions employé à réparer nos autres Vaisseaux, nous avions pu achever en si peu de tems un pareil Вâtiment, qu’ils s’imaginoient avoir été construit sur les lieux. Ils soutenoient au соmmencement, qu’il étoit pas possible, qu’un aussi misérable petit Navire fût venu d’Angleterre avec le reste de l’Escadre, et eût fait le tour du Cap Horn, dans le tems que les meilleurs Vaisseaux d’Espagne n’avoient point pu en venir à bout.

Etant arrivés à l’Ile de Juan Fernandez, nous examinames avec plus de soin les Lettres trouvées à bord de notre prise : et comme il parut par ces Lettres, aussi bien que par le rapport de nos Prisonniers que