Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/263

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viter soigneusement d’avancer vers le Nord, plus qu’il n’est absolument nécessaire pour trouver les vents d’Ouest. Suivant toutes nos idées c’est là une restriction for ridicule ; car on ne peut guère douter qu’en avançant plus vers le Nord, on ne trouvât les vents d’Ouest, plus constans et plus forts, qu’à 30 degrés de Latitude : desorte que tout leur plan de Navigation paroit fort sujet à critique. Si, au-lieu de faire route d’abord à l’E. N. E. jusqu’à la Latitude de 30 degrés et un peu plus, ils portoient au N. E. et même plus au Nord encore, jusqu’à ce qu’ils fussent à 40 ou 45 degrés, ils seroiont aidés dans une partie de ce cours par les vents alisés ; et sur le tout, je ne doute pas qu’il n’abrégeassent considérablement leur voyage, par cette maneuvre, et qu’ils ne le fissent peut-être même, dans la moitié du tems, qu’ils y mettent à présent. J’ai trouvé dans leurs Journaux, qu’après qu’ils ont perdu la terre de vue, ils sont quelquefois un mois ou six semaines, avant que de gagner les 30 degrés de Latitude, au-lieu que s’ils dirigeoient leur cours plus au Nord, ils pourroient faire ce chemin, dans le quart du tems ; et lorsqu’ils seroient parvenus à 40 ou 45 degrés, les vents d’Ouest les porteroient bientôt sur les Côtes de Californie, et au lieu de tous les inconvéniens, auxquels ils sont à présent exposés, ils n’auroient que ceux qui sont causés par une Mer plus rude et un vent fort. Tous ces raisonnemens ne sont pas de pure spéculation, je sai d’assez bon lieu qu’environ en 1721, un Vaisseau François, en suivant la route que je propose, fit la traversée des Côtes de la Chine, à la vallée de Vanderas, dans le Méxique, en moins de cinquante jours. A la vérité, on m’a dit aussi que l’Equipage, nonobstant le peu de tems qu’il mit à son voyage, souffrit extrêmement du Scorbut, et qu’il n’en restoit plus que quatre ou cinq hommes en vie, lorsqu’ils arrivèrent en Amérique. Mais sans insister plus longtems sur les moyens d’abréger ce Voyage, revenons à la manière dont il se fait à présent.

Dès que le Galion de Manille s’est avancé assez vers le Nord, pour trouver les vents d’Ouest, il garde la même Latitude, et dirige son cours vers les Côtes de Californie. Après avoir couru 96 degrés de Longitude, à compter du Cap Espéritu Santo, on trouve ordinairement la Mer couverte d’une Herbe flottante, que je conjecture devoir être une espèce de Porreau marin, par le nom de Porra, que lui donnent les Espagnols. La vue de cette Plante leur est un signe certain, qu’ils sont assez près de la Californie ; et ils y comptent si bien, qu’aussitôt qu’ils découvrent ces