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Juin, à six heures du soir, on eut la connoissance du Cap Delangano, à dix lieues de distance à l’Ouest. Le lendemain, on vit les Iles de Basbée, et comme le vent étoit trop au Nord, pour espérer de pouvoir les doubler, il fut résolu de passer entre les Iles de Graston et de Monmouth, où le passage ne paroissoit pas dangereux ; mais lorsque nous y fumes engagés la Mer nous y parut terrible, elle moutonnoit et écumoit, comme si elle eût été pleine de Brisans, et la nuit rendoit ce spectacle encore plus effraiant. Cependant les deux Vaisseaux passèrent sans danger, la Prise étant toujours de l’avant, et on s’appercut que le spectacle, qui nous avoit fait si grand peur, n’étoit causé que par une forte Marée. Il est bon d’observer, que quoiqu’on ne compte ordinairement que cinq de ces Iles de Basbée, il y en a pourtant plusieurs autres à l’Ouest de ces cinq, et comme les Canaux, qui les séparent, ne sont pas connus, il vaut mieux passer au Nord ou au Sud de ces Iles, que de s’y engager. Aussi étoit-ce bien l’intention du Commandeur, de passer au Nord de ces Iles, entre elles et Formosa, si le vent l’avoit permis. Delà nos Gens continuèrent leur cours vers Сanton, et lе 8 de Juillet ils découvrirent l’Ile de Supata, la plus Occidentale des Iles de Lema ; c’est le roc à deux pointes marqué particulierement dans la vue de ces Iles, insérée ci-devant. Cette Ile, suivant leur estime, est à cent trente-neuf lieues, et au Nord 82° 37’ vers lOuest, de celle de Graston. L’onzième ayant pris à bord deux Pilotes Lamaneurs Chinois, l’un pour le Centurion, et l’autre pour la Prise, ces Vaisseaux vinrent mouiller devant la Ville de Macao.

Dans ce tems-là, nos Gens avoient eu le loisir de compter la valeur de leur Prise : on trouva qu’elle étoit de 1 313 843 pièces de huit, et 35 682 onces d’Argent en Lingots ; outre une partie de Cochenille, et quelques autres marchandises d’assez peu de valeur, en comparaison de l’argent. Ce fut-là la dernière capture du Commandeur, qui jointe aux autres, fait à peu près la somme totale de 400 000 livres sterlings, pour tout le butin rapporté par le Centurion, non compris les Vaisseaux, marchandises, etc. que nos Gens ont détruit ou brûlé aux Espagnols, et qui sur le pié de l’estimation la plus modique, ne peuvent aller au-dessous de б00 000 livres sterlings ; desorte que la perte que notre Escadre a causée à l’Ennemi, va certainement au-delà d’un million sterling. A quoi si l’on ajoute les dépenses que fit la Cour d’Espagne pour l’équipement de l’Escadre de Pizarro les frais extraordinaires où elle fut engagée en Amérique, à cause de notre Escadre, et la perte de ses Vaisseaux de guerre, le total