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bois et de l’eau dans cette Ile, et y être resté à croiser au large de l’Ancrage pendant cinquante-six jours, s’ils n’avoient pas de nouvelles du Commandeur, ils pouvoient hardiment conclurre que quelque accident lui étoit arrivé, et reconnoître pour leur Commandant le premier Officier en rang qui se trouveroit entre eux, dont le devoir seroit de faire tout le mal possible à l’Ennemi par mer et par terre. Pour cet effet, ce Commandant avoit ordre de rester dans ces Mers autant que ses provisions et celles qu’il pourroit prendre sur l’Ennemi, pourroient durer, ne s’en réservant que la quantité suffisante pour conduire ses Vaisseaux dans la rivière Tigris, proche de Canton, sur la Côte de la Chine, d’où après s’être pourvu de nouvelles provisions, il regagneroit l’Angleterre, le plus vite qu’il pourroit. Et comme il fut trouvé impossible de décharger encore la Pinque Anna, le Commandeur donna au Maître de ce Vaisseau le même rendez-vous et les mêmes ordres.

Ces dispositions faites, l’Escadre fit voile de Ste. Catherine, le Dimanche 18 de Janvier, comme nous l’avons dit dans le Chapitre précédent. Le lendemain nous eûmes des raffales, accompagnées de pluies, d’éclairs, et de tonnerres, mais le beau tems revint bientôt, avec de petites brizes, et dura jusqu’au soir du Vendredi, que le vent fraîchit, et augmentant toute la nuit, le lendemain à huit heures du matin, nous eûmes une violente tempête, avec un brouillard si épais qu’il étoit impossible de voir à deux longueurs du Vaisseau, desorte que nous perdîmes le reste de l’Escadre de vue. Sur ces entrefaites, le signal fut donné par le Canon, pour venir au vent sur Basbord, le vent étant alors plein Est. Pour nous, nous amenames d’abord nos Huniers, carguames la grande voile et restames à la Cape, avec la voile d’Artimon bourcée, jusqu’à midi, que le brouillard se dissipa, et nous laissa voir tous les Vaisseaux de l’Escadre, excepté la Perle, qui ne nous rejoignit qu’un mois après. Le Tryal-Sloop nous restoit fort au-dessous du Vent, il avoit perdu son grand Mât dans la tempête, ayant été obligé de couper tout ce qui le retenoit, à cause des coups qu’il donnoit contre le Vaisseau. Nous derivames à son secours avec toute l’Escadre, et le Gloucester eut ordre de le prendre à la toue, car le gros tems ne finit tout-à-fait que le jour suivant, et il nous resta même encore après une grosse Mer qui venoit de l’Est.

Après cet accident nous continuames notre cours vers le Sud sans grande interruption, et nous trouvames les mêmes Courans que noue avions remarqués avant notre arrivée à Ste. Catherine, c’est-à-dire, que