Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/184

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prends congé demain et je pars ce soir. Après mon souper, je vais au Donjon.

— Dieu te bénisse, s’exclama Jonathan, encore une fugue. Quel gaillard !

— Allons, mon ami, laisse-le tranquille, dit Mme  Makepeace. Il a une idée en tête… je me demande ce qui le tourmente ?

— C’est le jeune sang et la fierté de vivre qui vous tourmentent, je connais ça. J’ai été tout pareil dans mon temps, répliqua hardiment Jonathan.

— Ah, je n’en doute pas, mon cher, lui dit sa femme pour le flatter. Attention à ce que tu fais avec ce couteau, ou tu vas te couper.

Elle aurait voulu émousser toutes les lames, rasoirs, serpes et faucilles avant de permettre à Jonathan d’y toucher.

Elle s’affaira à réchauffer un reste pour Robert, à tirer de la bière, à cirer ses brodequins neufs… « Dieu sait pourtant qu’il les aura crottés au bout de trois pas, se dit-elle, mais je saurai qu’il est parti propre. »

Robert redescendit vêtu de son costume des dimanches et Jonathan étouffa un rire, puis commença :

— C’est un enlèvement, voilà pourquoi il fait l’école buissonnière, un enlèvement. Avez-vous jamais entendu conter l’aventure de lord Meldrum de la Butte-aux-Genêts ? Ah, ça c’est une histoire ! Lord Meldrum s’éprit de la femme du Seigneur Lineacre, et elle de lui, mais pas de tout son cœur, apparemment. Eh bien, Lord Meldrum alla chercher la plus longue échelle — l’échelle de la moisson contre la meule — et le voilà qui grimpe à la fenêtre de la dame, pendant que le Seigneur cuvait au lit un dîner de fête. Alors Mme  Lineacre regarde son mari, qui était rouge et respirait lourdement. Et puis elle regarde Meldrum : il avait son plus bel habit